26/12/2010
Réalisme cynique
Plusieurs plaintes ayant été déposées, les laboratoires Servier devront s'expliquer en justice sur la commercialisation persistante du MEDIATOR, dont des études cliniques avaient reconnu la dangerosité. Nul doute que la responsabilité des médecins prescripteurs ainsi que des autorités de santé sera évoquée devant les juges. Longue bataille juridique en perspective avant de savoir si le laboratoire a été d'un réalisme cynique ou d'une bonne foi sans faille. Le réalisme cynique est le nom d'un mouvement pictural chinois né après Tian anmen en 1989 dont Yue Minjun est un des représentants les plus éminents.
Yue Minjun - Exécution
Je ne connais rien au MEDIATOR ni à la dimension médicale du dossier. Rien à dire sur le fond donc. Sauf un souvenir ancien, plus de quinze ans, à propos des Laboratoires SERVIER. L'affaire avait, à l'époque, été révélée par le Canard Enchaîné. Etaient en cause les pratiques de recrutement du Laboratoire : non seulement discriminantes en fonction de l'origine mais également basées sur des prises de référence personnelles (chaque candidat devant fournir le nom de trois connaissances personnelles qui étaient contactées pour tracer le profil de personnalité du candidat) et dans certains cas sur des enquêtes confiées à d'anciens policiers ou agents des renseignements généraux. Quel rapport avec le MEDIATOR ? aucun a priori, sauf si vous considérez que la manière dont une entreprise gère les ressources humaines n'est jamais anodine et que les pratiques seules témoignent des valeurs d'une organisation.
22:40 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : canard enchaîné, servier, mediator, recrutement, ressources humaines, grh, valeurs, éthique, yue minjun, réalisme cynique
23/12/2010
Un mal pour un bien
Maillol était peintre. Né à Banyuls, il pouvait difficilement résister à la lumière du Roussillon, à la douceur du soleil sur les vignes des collines qui ont constitué son premier terrain de jeu. Comme Céline ne vint à la littérature que passé 40 ans, Maillol attendit le même âge pour devenir sculpteur. Le fait déclenchant fut une maladie de l'oeil. La lumière n'irradiait plus de la même manière et la peinture devenait une entreprise difficile, même si Monet ou Matisse sont des contre-exemple. Mais à quoi bon les contre-exemples, c'est soi-même qui est en cause dans ces affaires et non les autres. Grâce à la maladie, si l'on peut dire, il est donc possible d'admirer aujourd'hui les trois graces.
Les trois grâces photographiées par une catalane
Peut être l'article 84 de la loi de financement de la sécurité sociale nous vaudra-t-il dans l'avenir quelques chefs d'oeuvre inattendus. Pourquoi ? parce que cet article modifie l'article L. 323-3-1 du Code de la sécurité sociale qui permet désormais, avec l'avis favorable du médecin traitant et du médecin conseil de la CPAM, de suivre des actions de formation, d'évaluation, d'accompagnement, d'information ou de bilan de compétences pendant un arrêt maladie et le tout sans perdre les indemnités journalières. Au passage, pour ceux qui considéraient que le DIF pendant un arrêt maladie n'était pas possible, voici une procédure tout à fait légale qui permet son exercice.
Quoi de plus normal ? la maladie n'est pas nécessairement invalidante et si elle empêche le travail elle n'empêche pas toujours la formation et lorsqu'elle est invalidante, il ne s'agit que d'une raison de plus pour anticiper un reclassement.Et il n'est pas exclu que pour nombre de cas, la possibilité de suivre une formation ait également une vocation thérapeutique.
Si la maladie n'est jamais souhaitable, et rarement souhaitée, voici qu'elle pourrait désormais receler des opportunités pour peu que l'on se saisisse de ce texte. Et qui sait, sur le chemin de la formation peut être verra-t-on surgir de manière improbable un clin d'oeil au malade de Maillol.
00:37 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : arrêt maladie, trois graces, dif, formation, lfss, maillol, matisse, sculpture, peinture, monet, banyuls, ressources humaines, droit du travail
19/12/2010
Exception culturelle
La France est le pays de Descartes, donc celui de la raison. Cette affirmation se vérifie devant les tribunaux chez qui la colère a mauvaise presse et l'insulte plus encore. Lorsqu'un salarié insulte son responsable ou un collègue, le juge considère systématiquement que le licenciement est justifié. Pas la peine d'argumenter que ce type d'insulte est courant dans le milieu, que l'on est en France et qu'un peu de gauloiserie n'est pas grave, ni même d'invoquer Nougaro ("on se traite de con à peine qu'on se traite..."), l'insulte est un comportement grave qui doit être sanctionné comme tel. L'insulte est d'ailleurs un comportement qui, si elle est répétée, constitue un fait de harcèlement. Rappelons nous que devant Salomon, ce n'est pas la mère qui crie sa colère à qui l'on donne raison mais celle qui garde son calme et propose de donner l'enfant pour qu'il soit sauvé. La colère est mauvaise conseillère, on connaît le proverbe ou, comme le dit Montaigne : "Il n'est passion qui ébranle tant la sincérité des jugements comme la colère".
Nicolas Poussin - Le jugement de Salomon - 1649
Et puisqu'il est question de Montaigne, remarquons que 50 ans avant le "Vérité en deça des Pyrénées, erreur au-delà" de Pascal, il avait déjà fait le constat que les lois s'accordaient aux moeurs et aux lieux : "Quelle vérité est-ce que ces montagnes bordent, mensonge au monde qui se tient au-delà ?". Le tribunal supérieur de Madrid, après celui de Catalogne en 2009 qui avait pris une position similaire, considère qu'en ce contexte de crise et de tension sur l'emploi, le fait de traiter son chef de "Hijo de puta" est certes répréhensible, mais pas au point de justifier un licenciement. De même, le tribunal supérieur d'Andalousie n'a pas validé le licenciement d'un salarié qui bouscule son patron car il craignait d'être licencié. Comportement à replacer dans le contexte économique dont les excès pourraient en justifier d'autres ? exception culturelle dans un pays latin où les relations humaines peuvent aussi rapidement monter en température qu'elles redeviendront cordiales par la suite ?
Ayons dans tous les cas une pensée pour le difficile métier de juger qui consiste à tracer des frontières stables entre les situations, ce qui ne peut qu'aboutir au final à une perception d'injustice. L'insulté pourra s'étonner de devoir continuer à travailler avec l'insulteur, le licencié pourra s'offusquer que l'on mette sur le même plan un emploi et un revenu et un échauffement sans lendemain et compréhensible. Notre perception serait-elle la même suivant que nous serions l'un ou l'autre, juge en deçà des Pyrénées ou juge au-delà ?
18:31 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne, licenciement, hijo de puta, poussin, peinture, ressources humaines, droit du travail, insulte, faute grave
10/12/2010
Une belle oeuvre, inachevée
Picasso dut répondre à la question d'Henri-Georges Clouzot qui tournait en 1955 "Le mystère Picasso" : "Quand une oeuvre est-elle terminée ?". La réponse n'est pas dans les mots. Elle est sur la toile, elle est dans la perception évidente, soudaine, que tout se tient, que tout est en place et que c'est terminé. L'histoire de la peinture est riche de repentirs traqués par les rayons X de la modernité. Les toiles sous les toiles fascinent pour comprendre la construction du tableau. Elles ne nous apprennent pourtant rien sur l'instant de la fin du tableau. La question n'est pas ce qu'a fait le peintre avant, mais pourquoi il s'est arrêté à ce moment là, à cet endroit là. Henri-Georges Clouzot ne savait pas, en 1955, que quelques années plus tard il laisserait une oeuvre inachevée qui deviendrait une légende. Les 185 bobines jamais montées de l'Enfer sont un des mythes du cinéma, moins sulfureux par le titre que par la belle Romy.
Les partenaires sociaux n'ont pas tourné 185 bobines de film, mais ils ont signé plus d'une dizaine d'accords nationaux interprofessionnels de référence dans le domaine de la formation professionnelle. A l'occasion du 40ème anniversaire du premier d'entre eux, conclu en 1970, une chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF fait le point sur les apports de la négociation collective à l'évolution et la transformation de la formation professionnelle. La matière formation passée au moule de la négociation par les artistes paritaires donne une oeuvre inachevée mais qui conserve pouvoir de séduction et promesses d'avenir. Seront-elles tenues ? la parole reste aux artistes.
A propos du 40e anniversaire de l'ANI de 70.pdf
Et pour ceux qui seraient plus sensibles aux charmes de Romy Schneider qu'à ceux du droit de la négociation collective appliquée à la formation, ce que nous ne saurions blamer, voici quelques extraits choisis des 185 bobines pour réchauffer un week-end d'automne aux couleurs hivernales.
17:04 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, DROIT DE LA FORMATION, FRAGMENTS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : romy schneider, l'enfer, clouzot, picasso, ani, formation, anniversaire, 40 ans, négociation, ressources humaines
09/12/2010
Oiseau rare
Les recruteurs font un métier difficile. Submergés de candidatures, poursuivis au téléphone, harcelés de mail, encombrés de commande contradictoires de la part de la DG, de la DRH et des managers, sommés de s’expliquer sur une candidature non retenue, insultés par les postulants écartés, mal vus par les candidats intégrés qui leur font longuement payer le pouvoir qu’ils ont un instant exercé sur eux, ou la question jugé insolente ou déplacée, peu considérés des managers qui veulent revoir tous les candidats, envoyés à l’abattage par la DRH qui exige que les 300 CV soient traités dans la journée, les 50 entretiens qui suivent planifiés dans la soirée et réalisés en deux jours, ils sont également sommés de trouver l’oiseau rare, autrement dit le mouton à cinq pattes.
Une telle situation appelant la solidarité et la virile fraternité, quoi que bien des recruteurs soient des recruteuses, voici une modeste contribution à la recherche du candidat idéal.
Maxence Scherf – Chat migrateur
Avouez que le profil est séduisant : malin comme un chat, vif comme l’oiseau, rapide comme le poisson, une tête et des ailes d’ange, une aptitude à la mobilité, un regard franc et direct, ses capacités ne font guère de doute. Et pourtant, l’animal fut recalé sur photo sans même être convoqué à l’entretien. Le motif ? pas l’ombre du début d’une patte et encore moins de cinq. Je ne suis pas un mouton cria le chat migrateur. Rien à faire. Décidément, véritablement indécrottables les recruteurs.
00:15 Publié dans TABLEAUX PARLANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : recrutement, ressources humaines, candidature, cv, chat
07/12/2010
Une pause dans le dialogue social
Si le dialogue social a des vertus, certains jours il est bon de s'octroyer une pause. En profiter pour laisser son oreille vagabonder et capter les bruits de la rue. Et l'on peut parfois surprendre d'autres dialogues :
- Tu vas comment en ce moment ?
- Moyen, comme les humains ont des jambes pour voyager, j'ai des roues mais je passe la journée enchaînée à un piquet qui n'a guère de conversation...
- Il n'y a pas de justice. Tu sais ce que disait Caton l'Ancien ? "Ceux qui volent des individus passent leur vie au cachot couverts de chaînes, ceux qui volent l'Etat sont vêtus d'or et de pourpre"...
- Pas faux, pour autant j'aimerai bien voler la clé du cadenas parce que j'ai essayé la formule de Gandhi : "A l'instant où les esclaves décident qu'ils ne sont plus esclaves leurs chaînes tombent" mais sans succès...
- Tu te souviens de Louis Pauwels ? non ? pas grave. Mais référence pour référence il disait que s'il suffisait de s'asseoir dans la position du lotus pour atteindre l'illumination, toutes les grenouilles seraient des Bouddhas...
- Et qui te dis qu'elles ne le sont pas ?
- T'as pas tort...
- Et toi, la forme ?
- Pas terrible, par les temps qui courent, pas simple d'être une roue voilée...
- Ne perdons pas espoir, tu sais ce que disait Cervantes ? la roue de la fortune tourne plus vite que celle des moulins.
00:07 Publié dans DES IDEES COMME CA, FRAGMENTS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dialogue, ressources humaines, formation, gandhi, caton, pauwels, bouddha
06/12/2010
Du rythme !
Au début du XXème siècle, Blaise Cendrars donnait du rythme à la poésie : en lui faisant prendre le transsibérien et en créant, avec la complicité de Sonia Delaunay, le premier livre simultané, autrement dit le premier livre artistique par sa typographie et son iconographie. Et ce n'est pas tout : relié d'un seul tenant, le livre se déplie et se déploie, se mettant lui-même en mouvement. La prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France rompt avec la poésie romantique et classique des décennies précédentes. Elle propulse dans la modernité, à coup de chevaux vapeurs et de sifflets de locomotives, une manière nouvelle de faire de la poésie. En rythme.
Blaise Cendrars - Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France
Livre simultané illustré par Sonia Delaunay
Les acteurs sociaux feraient bien, au choix, de lire Blaise Cendrars ou de prendre le transsibérien pour retrouver du rythme. Que l'on en juge :
- La préparation opérationnelle à l'emploi (POE) est une des grandes innovations de la loi du 24 novembre 2009. Elle prévoit une utilisation massive des ressources du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) pour les formations de demandeurs d'emploi liées à des embauches. Le texte n'appelle aucun décret d'application. Juste une convention entre le FPSPP et Pole Emploi pour une mise en oeuvre opérationnelle. Plus d'un an après l'entrée en vigueur de la loi, la convention n'est toujours pas conclue et la POE ne fonctionne pas. Pas grave, les chômeurs ne râlent pas.
- La même loi prévoyait, conformément à l'ANI du 7 janvier 2009, qu'une négociation fixerait les conditions de mise en oeuvre du bilan d'étape professionnelle. Près de deux ans après la signature de l'ANI, aucun calendrier n'est fixé pour négocier la mise en oeuvre du bilan d'étape professionnel. Pas grave, personne n'a compris à quoi il servait entre l'entretien professionnel et le bilan de compétences.
- Les partenaires sociaux ont ouvert plusieurs chantiers dont deux qui portent sur leurs relations mêmes : le financement du paritarisme et la réforme des institutions représentatives du personnel. Ces deux thèmes n'apparaissent pas, à ce jour, dans les sujets qui pourraient être inscrits à l'agenda social 2011. Pas grave, l'Etat trouvera là un argument supplémentaire pour reprendre la main sur les terrains désertés par les partenaires sociaux qui protesteront, mais un peu tard.
Tout se passe comme si d'urgence il n'y avait point, comme si le rythme était celui de la vie des petites boutiques et des petites affaires. Le rythme de ceux qui décident n'est décidément pas celui de ceux qui auraient besoin qu'ils agissent vite et bien, c'est à dire deux fois bien.
02/12/2010
Les sociomanes de la Génération Y
La sociologie est fondamentale pour comprendre le fonctionnement des organisations, les jeux de pouvoir, les cultures, les évolutions d’une société, au sens large. Mais peut-elle saisir l’individu ? Dans un ouvrage paru en 2009 intitulé « Les sociologies de l’individu », François de Singly et Danilo Martuccelli invitent à prendre en compte l’inscription de l’individu dans plusieurs réalités sociales et à considérer l’irréductible singularité individuelle pour ne pas procéder à des généralisations trop hâtives, y compris lorsqu’elles procèdent d’enquêtes de terrain.
De cette exigence méthodologique, certains font peu de cas, notamment ceux qui ont construit un petit fond de commerce sur la génération Y. Cette génération regrouperait les 24-34 ans, soit en France près de 8 millions de personnes. Qui partageraient comme caractéristiques communes d’être : nés avec une souris, sans peluches, dans la main droite, un écran d’ordinateur en guise de portique à jouet, une zapette dans la main gauche, une frénésie de changement, une quête éperdue de sens, une inscription dans le court terme, un besoin de reconnaissance et d’épanouissement personnel, etc. Si vous voulez la suite prenez n’importe quel horoscope ou lisez l’interview de Frank Bournois dans Entreprise et Carrières n° 1026 et vous découvrirez enfin comment manager ces hordes de barbares technologiques qui n’ont pas les codes des organisations mais ont tous soif d’apprendre (sic).
Philippe de Champaigne - Crucifixion
A ce degré de généralité, les soucis méthodologiques sont bien loin. Pourtant si l’on y regarde d’un peu plus près, avec quelques travaux sérieux dont ceux de Bernard Lahire, on s’aperçoit que l’on peut être inculte en matière de nouvelles technologies et manipuler sans problème un portable, une PS3 ou sa page Facebook, que jamais la fragmentation sociale n’a été aussi importante, que toute classe d’âge est constituée d’appartenances sociales diversifiées, que jamais les trajectoires individuelles n’ont été autant diversifiés et que si le changement est si rapide que le rapportent les tenants de la génération Y, alors il est absurde de considérer qu’un même phénomène générationnel impacte de la manière identique des générations nées avec dix ans d’écart.
Bref, tout ceci flaire la supercherie. Et s’il s’agit simplement d’obtenir un succès médiatique ou de librairie, conseillons aux sociomanes de nous refaire le coup du Da Vinci Code et de proclamer avec sérieux et sans sourire, ils en sont capables, que Jésus était le fondateur de la Génération Y, et que cette vérité est non seulement dépourvue de tout ambigüité mais qu'en plus elle peut se constater de visu. C'est pas une preuve ça ?
29/11/2010
Le donné et le construit
Que la formation réponde aux besoins des entreprises. Tel est le credo de nombre de responsables politiques, éducatifs ou de notre système de formation professionnelle. Si l'on prend ce point de départ, les besoins sont une donnée à laquelle les individus, dispositifs, systèmes, institutions doivent s'adapter.
Même si cela était vrai, la notion de besoin serait largement discutable : s’agit-il uniquement de pourvoir les offres d’emploi ? lesquelles ? peut-on les prévoir ? s’agit-il des besoins à deux ans, trois ans, dix ans ? quelle est la durée de l’investissement réalisé ? quelle est la nature de ces emplois ? en préparant à certains emplois est-ce que l'on prépare véritablement l'avenir ? etc.
Magritte et The Vache
Mais ces questions sont vaines car les besoins ne sont pas un donné mais un construit. Une entreprise a des besoins qui fluctuent en fonction de ses rythmes et cycles de vie, de son environnement, de ses projets, des histoires des salariés qu’elle emploie, etc. Elle vit en perpétuelle interaction interne ou externe. Et dans ces interactions, le niveau de qualification de la main d’œuvre joue un rôle. En d’autres termes, si le système éducatif produit le double d’ingénieur cela aura un impact sur la stratégie et l’organisation des entreprises qui intègreront ce facteur d’une main d’œuvre disponible.
Partir des besoins des entreprises c’est comme partir du poste de travail pour la gestion des compétences. C’est oublier que les organisations sont d’abord faites par les hommes et les femmes qui les dirigent et qui y travaillent et que si l’on modifie le profil de ces dirigeants et travailleurs, on modifier l’entreprise…et ses besoins.
Nos dirigeants devraient se souvenir que ce n’est pas l’homme qui fait la fonction ni la fonction qui fait l’homme mais que les deux sont en interaction. Bref, il devrait redécouvrir l’analyse systémique en lieu et place de la linéarité.
Ceci dit, pour la poule et l’œuf, on a toujours pas de réponse.
11:14 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : besoin de formation, formation, éducation, entreprise, ressources humaines, magritte, the vache, poule, oeuf
23/11/2010
Point d'archimède
J'ai toujours été impressionné par l'image d'un enfant faisant voltiger un homme corpulent, par le seul effet d'un bras de levier. La découverte du point d'archimède a été une révélation a plusieurs égards.
En premier lieu, le point d'archimède vérifie que si la réflexion ne doit pas entraver l'action, le temps pris pour comprendre et analyser un problème n'est jamais du temps perdu. La qualité de l'action dépend souvent de la qualité du diagnostic.
En deuxième lieu, il ouvre des horizons et rend possible ce qui semblait ne pas l'être. Ce qui paraît naturellement impossible, qu'un bambin renverse un homme adulte, le devient dès lors qu'il agit de manière adéquate.
En troisième lieu, le point d'archimède démontre que la sophistication de l'outil n'est pas une condition de son efficacité. Voilà de quoi soulever le monde pour peu que le point d'appui soit judicieusement choisi.
Et la quatrième leçon que je tirais du point d'archimède est une remise en question des hiérarchies dites naturelles. Pourquoi l'adulte aurait-il raison de l'enfant ? dans certaines situations, la balance penche du côté inattendu. Fi des statuts, des fonctions et des intentions, c'est au moment de la mise en action que l'on voit qui a choisi le bon côté et le meilleur levier pour agir.
Certes l'action en ressources humaines n'est pas mécanique, mais ce n'est pas une raison pour se priver de faire des bons diagnostics, de rendre possible ce qui semblait inatteignable et le tout en utilisant des outils simples. Mais alors, gare à l'ordre établi ! et c'est pourquoi l'on ne répéta pas trop qu'il suffisait d'un bon levier.
10:14 Publié dans PEDAGOGIES, TABLEAU NOIR | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : point d'archimède, ressources humaines, diagnostic, levier, pédagogie, formation
28/10/2010
Quand les RH font peur
Le mail de la DRH est plutôt attentionné. Adressé à tous les salariés de plus de 45 ans, il leur propose un entretien professionnel pour faire un point sur leur carrière et leurs compétences et les informer de leurs possibilités d'orientation et/ou de formation. Il est précisé qu'il s' inscrit dans le cadre de l'accord sur l'emploi des seniors. Il est proposé au salarié de choisir entre un entretien réalisé par le service RH ou avec un consultant externe, le contenu étant le même dans tous les cas. Il aurait pu être précisé que cet entretien n'était que la mise en oeuvre de l'obligation légale posée par la loi du 24 novembre 2009 de réaliser avec tous les salariés de 45 ans et plus un entretien de seconde partie de carrière. Bref, une obligation que l'entreprise s'apprête à mettre en place en bon élève. Sans avoir anticipé la panique que le mail déclencha chez certains collaborateurs. Pourquoi moi ? pourquoi un point sur ma carrière ? pourquoi parler de mes compétences ? que me veut la DRH ? on veut me virer ? et les managers d'éteindre le feu innocemment allumé par les ressources humaines. Quand vous rêvez de votre DRH (mais si, mais si...), c'est un rêve ou un cauchemar ?
Johann Heinrich Fussli - Le cauchemar - 1871
La réaction des salariés n'est pas particulièrement à mettre sur le compte du climat d'entreprise. La société va bien, elle est en croissance, il n'y a jamais eu de réduction d'effectifs, et le turn-over n'est pas une objectif en soi. Plutôt jeune, elle a de manière récente fait une plus large place à des profils de seniors avec un niveau d'expérience et d'expertise élevé. Très peu de raisons internes donc d'avoir peur. Il faut sans doute y voir une crainte plus large, plus diffuse, liée à des années de politiques RH en direction des seniors, dont on ne s'occupait que pour s'en séparer, et peut être aussi d'image des bilans de compétences ou entretiens de carrières, jamais si développés que pour accompagner les départs. Bref, ce que la DRH n'avait pas anticipé c'est que proposer un bilan aux seniors à l'aune des pratiques passées ce n'est pas une bonne nouvelle. Et que pour une telle nouveauté, le canal du mail était peut être insuffisant.
Le second enseignement de l'histoire est qu'il ne faut jamais présumer le bonheur d'autrui et surtout pas en fonction du notre. A défaut, on retombe dans la RH magique, celle qui pétrie de bonnes intentions déclenche des réactions de défiance ou de rejet chez les salariés. Quel métier !
00:05 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : drh, ressources humaines, entretien professionnel, cauchemar, mail, communication, management, seniors, plan emploi senior
20/10/2010
La rémunération doit-elle être juste ?
Rassurez-vous, la rentrée n'a pas déjà dissipé tous les effets bénéfiques de l'été et il ne s'agit pas ni de savoir si le salaire doit être conforme aux règles ni la paie correctement effectuée. Il s'agit de savoir si le système de rémunération d'une entreprise et la justice ont à faire ensemble. En d'autres termes, les salariés attendent-ils d'un système de rémunération qu'il soit juste ? et un système juste a-t-il plus d'effets sur la motivation, l'efficacité, l'implication, la fidélité qu'un système qui le serait moins ? à toutes ces questions il ne pourra être répondu dans cette courte chronique qui prétend tout de même livrer quelques éléments de réflexion.
Le cabinet Mercer a publié le 4 octobre dernier son enquête de rémunération France 2010 (voir Entreprise et Carrières n° 1019). On y apprend, notamment, que la part accordée aux augmentations individuelles -dont le taux median varie entre 1,5 % et 2 %- est désormais supérieure à celle des augmentations générales -taux médian entre 1,3 % et 1,5 %. Selon Bruno Rocquemont, responsable des enquêtes et rémunérations chez Mercer, cette primauté des augmentations individuelles s'inscrit dans la logique d'une gestion des talents et permet d'éviter les effets de saupoudrage. Sur ce dernier point, il faudrait élargir le regard : sous couvert d'individualisation, on connaît les managers qui "font tourner" et récompensent individuellement sur quelques années...l'intégralité ou quasiment de leur équipe faisant échec aux systèmes individualisés. Mais notre sujet était la justice.
Salvador Dali - Lame de Tarot - La justice
Transportons nous dans le monde judiciaire : vous êtes juré d'assise, le procès touche à sa fin, aucune preuve matérielle n'a été apportée de la culpabilité et vous n'avez face à vous que quelques éléments troublants mais pas de certitude. Est-ce que vous condamnez ou est-ce que vous acquittez ? en d'autres termes, pensez-vous qu'il vaut mieux prendre le risque d'un innocent en prison ou d'un coupable libre ? Si vous penchez pour la première hypothèse, l'étude de Mercer vous confortera : il vaut mieux ne pas augmenter tous les salariés selon leur travail mais uniquement quelques uns (l'individualisation supposant que certains ne soient pas augmentés), alors que si vous penchez pour la seconde hypothèse, vous préfèrerez augmenter plus largement pour ne sanctionner aucun des salariés ayant fourni des efforts, au risque de rémunérer certains qui en ont peu fourni. Quand à savoir si en prédéterminant une enveloppe limitée il est possible de n'augmenter que les salariés qui le méritent mais sans en oublier aucun, sur le papier c'est déjà difficile mais dans le cadre d'une prise de décision manageriale cela finirait par relever du hasard. Il vous reste aussi la possibilité de considérer que justice et rémunération n'ont rien à faire ensemble.
00:05 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DANS LA PRESSE | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : entreprise et carrières, rémunération, enquête, mercer, justice, dali, peinture, ressources humaines, égalité, équité, droit, salaire
13/10/2010
Pas de motif, un seul motif
Le droit du travail oblige parfois l'employeur à motiver ses décisions, notamment en matière disciplinaire ou de licenciement. Mais ce principe n'est pas général et certaines décisions, qui pourtant font grief au salarié ce qui justifierait, sur le principe, qu'il puisse en connaître les raisons, n'ont pas à être motivées. Pourquoi cette différence ? avançons une explication sans avoir vérifié si elle ne comportait pas de contre-exemple. Deux lois relativement récentes ne font pas obligation à l'employeur de motiver sa décision qui doit pourtant être écrite. Elles nous permettent peut être de comprendre pourquoi certaines décisions n'ont pas à être motivées : parce qu'il n'existe qu'un seul motif possible. L'unicité du motif est un thème cher à Jean-Pierre Balagué, peintre toulousain.
Jean-Pierre Balagué - Sans titre - 2004
La loi du 25 juin 2008 a réformé le droit de la période d'essai en prévoyant une rupture possible par l'employeur sous la seule condition de respect d'un préavis mais sans motivation. Pourquoi ? parce que le seul motif possible de la rupture d'une période d'essai est une évaluation négative des compétences du salarié dans son travail, ce qui est l'objet même de la période d'essai (C. trav., art. L. 1221-20). Si le salarié prouve que d'autres motifs sont à l'origine de la rupture (motif économique notamment ou motif non inhérent à l'appréciation de ses capacités), la rupture sera considérée comme abusive. Un peu antérieure, la loi du 4 mai 2004 a introduit dans le code du travail le droit individuel à la formation (DIF) conçu par les partenaires sociaux. Ce droit nécessite un accord entre l'employeur et le salarié pour pouvoir être mis en oeuvre. Si l'employeur refuse une demande de DIF il n'a pas, légalement, à motiver ce refus. Pourquoi ? parce que le seul motif de refus possible est un désaccord sur la formation choisie par le salarié. Il n'est en effet pas question pour l'employeur de nier le DIF mais simplement d'en négocier la mise en oeuvre. Dès lors, en cas de refus, inutile pour le salarié de s'entêter à représenter des demandes similaires. Mieux vaut inverser la proposition et demander à l'employeur quelles sont les formations pour lesquelles il est prêt à accepter une demande de DIF. Ce qui renverra l'entreprise à l'obligation de décider d'une politique de DIF qu'elle doit présenter tous les ans au comité d'entreprise. Certaines conventions collectives imposant la motivation, les entreprises ont tout intérêt à s'en tenir au motif légal. En effet, un refus fondé sur une absence de budget ou un refus de financement de l'OPCA pourrait être criticable car étranger au seul motif légalement prévu. Et l'on constate qu'absence de motivation ne signifie donc pas totale et discrétionnaire liberté de décision.
01:10 Publié dans DROIT DE LA FORMATION, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : dif, période d'essai, motivation, contrat de travail, droit, droit du travail, ressources humaines, formation, rupture du contrat
12/10/2010
Manifestation intensive
Il est souvent bon de rappeler des évidences, peut être même faudrait-il commencer par cela. Il fut ces jours-ci répondu à cette injonction de diverses manières.
Lors d'un Congrès HR, DRH et consultants s'entendirent pour considérer qu'après avoir créé des outils, la GPEC devait s'attacher à donner du sens. Voilà qui aurait pu être utilement rappelé il y a quelques années tant pour la GPEC que pour le knowledge management.
Jean-Marie Haesslé - Intensive Knowledge - 1995
Persuadée également des bienfaits de l'évidence, la Cour de cassation vient de rappeler qu'une entreprise ne peut attendre 5 semaines pour procéder à un licenciement pour faute grave. L'entreprise invoquait en vain que le Code du travail lui laisse deux mois pour prononcer une sanction disciplinaire. Imperturbable, force de l'évidence, le juge rappelle que la faute grave étant définie par l'impossibilité de poursuivre la relation de travail, elle impose une rupture quasi-immédiate (Cass. soc., 6 octobre 2010).
Enfin, on peut relever que Luc Chatel a rappelé que "la réforme des retraites, c'est la réforme des jeunes". Une nouvelle manifestation de l'évidence. Intensive.
01:00 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : luc chatel, retraite, réforme, manifestation, gpec, ressources humaines, licenciement, faute grave
10/10/2010
Indépendance de la valeur
Surgie du noir le plus profond, elle vous toise et ses yeux vous en imposent sans besoin de croiser les vôtres. L’enfance est en ses joues, la détermination raffinée barre son front, ses principes s’incarnent dans son port, la rigueur de son esprit lisse sa coiffe, la sensualité est la nature même de la belle milanaise. Qu’elle fut la maîtresse de Sforza importerait peu si cela n’avait suscité chez l’amant la commande que Léonard et son atelier surent mettre à profit pour faire jaillir l’envoûtant chef d’œuvre. En quoi l’acte marchand initial disqualifierait-il en quoi que ce soit la beauté de la belle ferronnière ?
Léonard de Vinci - La belle ferronnière - 1497
J’ai souvenir d’un directeur d’école annonçant aux étudiants lors d’une rentrée que ce qui n’a pas de prix n’a pas de valeur. Il fallut à la fois lui rappeler que l’amour et l’amitié existent aussi sur terre et plusieurs semaines pour dissiper la stupeur des étudiants. Mais faut-il pour autant, comme nous y invite Annie Le Brun, inverser la proposition et considérer qu’il ne faut mettre de valeur qu’en ce qui n’a pas de prix ? faut-il ne voir derrière toute transaction marchande que sa version péjorative sous forme de marchandisation ? La visite de l’exposition France 1500, décidément à ne pas manquer, constitue une forme de réponse. On y voit, dans la France de la fin du Moyen-Age, des artistes et artisans flamands, français, italiens ou encore allemands, se déplacer vers les lieux de création, mêler leurs techniques, découvrir de nouveaux horizons, croiser les influences, inventer chacun au sein d’un mouvement de création collective de nouvelles formes et manières de les modeler. Comment tout cela fut-il possible ? par la commande publique et privée, par le mécénat, par l’attention portée à l’art et par l’existence d’ateliers qui ont bénéficié des moyens nécessaires pour aller au bout de leurs capacités. Alors ? alors l’équation est insoluble tout simplement parce que valeur et prix n’entretiennent aucun rapport entre eux et que persister à vouloir en établir un, c’est toujours réduire le sens donné au mot valeur. Qu’il y ait prix ou non, il ne saurait en toute hypothèse être une condition ni une mesure de la valeur qui doit s’établir au regard d’autres hiérarchies. C’est plutôt à ces dernières qu’il convient de s’intéresser. Avis aux organisations qui prétendent avoir des valeurs qu'elles affichent comme des prix.
19:12 Publié dans TABLEAUX PARLANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : léonard de vinci, belle ferronnière, france 1500, valeurs, ressources humaines, prix, économie, peinture, exposition
07/10/2010
Machine infernale
Vous avez le droit de faire ce que la loi interdit dans les conditions définies par voie règlementaire. Ainsi pourrait être résumée la portée du décret du 25 août 2010 relatif aux stages en entreprise. La loi du 24 novembre 2009 a posé en principe que les stages en entreprise qui ne relèvent pas de la formation professionnelle continue doivent être intégrés à un cursus pédagogique selon des modalités définies par décret. L'objet ici est d'interdire les stages étudiants non intégrés à un cursus pédagogique et notamment les stages post-diplômes ou sans lien avec une véritable formation, qui constituent souvent du travail dissimulé.
Selon le décret, pour être considérés comme faisant partie d'un cursus pédagogique les stages doivent remplir deux conditions
• leur finalité et leurs modalités sont définies dans l’organisation de la formation ;
• ils font l’objet d’une restitution de la part de l’étudiant donnant lieu à évaluation par l’établissement.
Sont également considérés comme intégrés à un cursus, dès lors qu’ils répondent à ces 2 critères, les stages organisés dans le cadre de formations permettant une réorientation, de formations complémentaires, ou encore de périodes pendant lesquelles l'étudiant suspend temporairement sa présence dans l'établissement dans lequel il est inscrit pour exercer d'autres activités lui permettant exclusivement d'acquérir des compétences en cohérence avec sa formation.
Georges Hugnet - C'est qu'elle sait être plus jolie encore la machine infernale - 1936
Saurait-on mieux dire que l'on peut faire ce que l'on veut ? en effet, tout stage post-diplôme servant à une orientation nouvelle ou à une formation complémentaire ne pose pas problème dès lors que l'établissement en prévoit le principe dans l'organisation de la formation ou simplement, comme le prévoit le décret, qu'un responsable formation ou pédagogique de l'établissement de formation l'a validé. Tout établissement peut donc valider des stages post-diplômes ou suspendre la formation pour que l'étudiant parte en stage...acquérir les compétences qu'il était censé obtenir par la formation ! et voilà comment plutôt que d'interdire ce que la loi voulait supprimer, on offre au contraire un cadre règlementaire qui permet de sécuriser les pratiques déviantes que l'on se proposait de réduire. Peut-on suggérer à nos gouvernants d'arrêter la machine infernale, de produire moins de textes et plus de droit ?
01:28 Publié dans DROIT DE LA FORMATION, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : stage, étudiant, loi, formation, entreprise, ressources humaines, éducation
29/09/2010
Vérité multiple
Le Conseil d'Etat a apporté sa pierre, le 23 juillet 2010, à la construction jurisprudentielle relative au harcèlement moral. Si la juridiction administrative a eu à se prononcer, c'est en raison de la qualité de membre du comité d'établissement de l'assistante sociale dont le licenciement était demandé pour des faits de harcèlement à l'encontre d'assistantes maternelles placées sous son autorité. Ce licenciement a été autorisé par le tribunal administratif mais censuré par la Cour administrative d'appel sur la base d'attestations nombreuses faisant état des qualités professionnelles de l'intéressée et de son souci constant de l'intérêt des enfants. Le Conseil d'Etat censure cette décision : on peut être un excellent professionnel et commettre par ailleurs des faits de harcèlement moral. En l'occurence, la question de la compétence de la salariée n'avait pas de rapport direct avec la question posée, à savoir s'il existait ou non des faits de harcèlement.
Ben Vautier - La vérité est multiple
Dans le Quatuor d'Alexandrie, Lawrence Durrell raconte une même histoire vue par 3 personnages différents qui nous permettent non pas de dire de manière un peu simpliste à chacun sa vérité, mais plutôt qu'il n'est pas contradictoire que la vérité puisse recevoir plusieurs visages. Ainsi, être un excellent professionnel ayant le souci de son activité et de sa finalité n'est pas une garantie absolue s'agissant des pratiques manageriales. On savait que l'individu n'était pas monovalent, on sait gré au juge de le rappeler à l'occasion.
23/09/2010
Fille de l'air
Je n'ai pas, comme Dutronc, rêvé toute ma vie d'être une hôtesse de l'air. Par contre, j'ai pris pendant des années la navette Toulouse-Paris, et retour, sans faire un tour dans le cockpit. Mais voilà que sur un Paris-Nice, le commandant de bord repère mon accompagnatrice et lui propose de voyager dans le cockpit. Dépité que jamais pareille proposition ne me fut faite, je m'installe bougon dans mon fauteuil, quand la susdite souriante vient me chercher après avoir négocié le second strapontin avec le commandant. Et le dépit changea de camp.
Accrochez les ceintures, c'est parti !
Décollage à Roissy et première surprise : sitôt en l'air le copilote se contorsionne et scrute le ciel. Dans l'embouteillage de Roissy, le radar se double d'un contrôle visuel. Commentaire : "Il était pas loin celui-là". On sous-estime à quel point l'ignorance peut être source de sérénité. Il est vrai que la connaissance est source de plaisir.
Depuis la Cabine, j'imaginais que sitôt le décollage effectué, le pilote automatique faisait son office pendant que les pilotes faisaient relâche dans l'attente de l'approche et de l'atterissage. Que nenni ! négociations des routes, évitement des orages et turbulences, contrôles divers et variés, check-up permanents, y a du taff !
La baie de Cannes, le cap d'Antibes, la baie des anges.
La piste vient à notre rencontre en souplesse. Toujours rien compris aux cadrans, mais c'est bien joli.
Merci au commandant et au copilote, plus dépités du tout ! Ceci dit, l'égalité professionnelle c'est quand on me proposera le cockpit un jour où je voyagerai seul !
00:48 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : air france, avion, cockpit, photo, photographie, ressources humaines, consultant, nice, paris, voyage
22/09/2010
Couper le moteur
Les salariés sont venus un dimanche matin. Ils étaient plus de soixante. Maquillage, déguisements, plus de fonctions, plus de hiérarchie ou plus exactement une nouvelle hiérarchie : celle du réalisateur qui crie Moteur ! puis, après cinq minutes de plan unique à l'improbable coordination, Coupez ! Le Lipdub de cet établissement mérite bien du genre. Les salariés en sont fiers, ils peuvent. Le film est envoyé au CODIR, comme exemple d'initiative d'un établissement qui se bouge. Résultat ? enfouissez le film, pas de You Tube, pas de diffusion, pas de concours, pas dans l'image, pas à l'époque des réductions de coût et des PSE qui couvent, pas à l'époque des dividendes exigés par les banquiers prêteurs, bref qui a eu cette idée à la con ? le travail c'est sérieux, pas le temps de rire ni de sourire. Ceci n'est pas une photo du CODIR :
Olaf Breuning - Easter Bunnies - 2004
Il est des jours où l'on désespère un peu, un peu seulement, de constater à quel point l'organisation fonctionne de manière descendante et si peu ascendante, à quel point l'autisme la mutile et à quel point plus elle est mutilée, plus se renforce l'autisme. Sous le doux nom de réalités économiques se dissimulent souvent des incompétences humaines et sociales qui conduisent inévitablement à l'échec collectif, mais qu'importe si cela se traduit par le succès pour quelques uns. Il est des jours où l'on peut avoir la tentation de l'Ile de Paques devant tant d'acharnement à couper le moteur de ceux qui ne demandent qu'à crier MOTEUR ! Vaine tentation vite oubliée, merci Olaf, pas de raison de s'arrêter, on remet ça dimanche prochain, allez MOTEUR !
00:47 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : olaf breuning, photo, photographie, lipdub, entreprise, management, compétence, économie, ressources humaines
12/09/2010
Il n'est jamais trop tard
Non ce n'est pas une chronique sur la réforme des retraites, quoi que, mais sur la manière de qualifier. Le prétexte en est fourni par le buzz musical et cinématographique de la rentrée : BENDA BILILI ou comment des polyomyélites congolais dormant sur des cartons à Kinshasa et répétant dans un zoo deviennent un groupe musical qui fait des tournées mondiales. Cela pourrait avoir des allures de conte de fées ou d'illustration facile du "Tout est possible" ou du "Qui veut peut". Il n'en est rien. La même histoire est rêvée tous les jours par des milliers d'individus qui ne parviendront jamais à faire entrer leurs rêves dans le monde extérieur. Sans pour autant avoir moins de talent ou de détermination que le Staff Benda Bilili. Quelle différence ? une rencontre improbable à un moment donné entre des musiciens paumés et deux réalisateurs de films qui ne le sont pas moins. Une certaine manière de saisir le hasard donc. Mais surtout cette forme d'énergie si particulière qui ne se rencontre que chez ceux qui n'ont pas peur, ni du quotidien, ni de la vie, ni d'autrui, ni d'eux-mêmes, et qui entreprennent sans penser à ce qu'ils pourraient perdre mais uniquement à ce qui peut leur arriver de meilleur. Avec comme slogan cette phrase qui donne une des meilleures chansons de l'album et du filme : "Dans la vie il n'est jamais trop tard".
Parmi les nombreuses scènes d'anthologie du film, on retiendra particulièrement :
- Un enfant qui bricole un santonge, instrument de musique associant boîte de conserve, fil et bout de bois courbe, et quitte l'école dès le premier jour en expliquant à ses parent que ce n'est pas l'école qui le mènera en Europe mais sa boîte à musique ;
- Le même qui écoute le discours moralisant et culpabilisant de sa famille avant sont départ pour l'Europe et les quitte d'un "Je vous remercie de vos conseils" ;
- Le responsable du groupe qui, depuis son fauteuil, prend à partie un moqueur en lui expliquant qu'il ne fait rien de sa vie et n'a donc pas de leçon à lui donner ;
- Le sentiment partagé par tous que tout est tragique et que c'est une bonne raison pour traverser la vie avec une certaine insouciance puisqu'on y peut rien. Ou comment un certain sentiment de fatalité est la clé de la liberté.
Et si vous n'avez pas complètement oublié pendant le film que vous vous occupez de ressources humaines, vous pourrez vous demander après coup si, pour parler des BENDA BILILI, vous utilisez prioritairement l'expression "Groupe de handicapés", "Groupe de congolais" ou "Groupe de musiciens". Et si vous choisissez une combinaison, reste à déterminer l'ordre et le nombre de qualificatifs : "Groupe de handicapés congolais musiciens" est possible mais "Groupe intergénérationnel de passionnés" également. La manière de qualifier autrui peut ainsi en dire plus sur soi-même que sur les autres.
22:16 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : benda bilili, cinéma, musique, travailleurs handicapés, handicap, polio, ressources humaines, congo, santonge